Céline Agniel (presse)

L’Actualité Poitou-Charentes n° 105 / juillet août septembre 2014 – Mélanie Papillaud/ photo Claude Pauquet :

Céline Agniel follement inspirée
«La folie est une énigme qui nous touche tous. Notre part obscure. Elle permet d’interroger ce qui fonde notre humanité. Toujours pas très loin mais pas forcément une menace.» Kafka, Panizza, Virginia Woolf … De pièce en pièce, Céline Agniel explore les liens “très forts“ entre théâtre et folie. «Tous deux ont à voir avec la question du réel, dujeu, du délire. D’un point de vue poétique, la folie est un ressort créatif. D’un point de vue politique, elle questionne l’exclusion. La folie peut aussi être reliée à la passion. Dans Fragments d’un discours amoureux, Roland Barthes rapproche l’amoureux et le psychotique.»
Céline Agniel a fondésa compagnie têteÀcorps il y a douze ans à Paris. «Une fabrique théâtrale» où elle expérimente des formes nouvelles et où «le corps parle avnat les mots». Parallèlement à la création de spectacles, elle conduit des projets d’actions artistiques en milieu scolairemais aussi en psychiatrie. Entre 2006 et 2013, Céline Agniel a créé trois spectacles avec des malades psychotiques d’un hôpital de jour de La Courneuve. Une expérience qui la bouleverse encore aujourd’hui. «L’atelier est basé sur de l’improvisation : ils inventent des personnages qui vont se rencontrer. Ils sont ainsi dans une présence à eux-mêmes et aux autres. Certains, qui n’arrivaient même pas à soutenir le regarsd d’autrui, ont été capables d’interagir sur scène et avec le public.»
Au cours de ses études de philosophie, Céline Agniel est marquée par la pensée de Michel Foucault. Son DEA, qu’elle obtient à Nanterre en 1994, s’intéresse aux liens que le philosophe tisse entre théâtre, philosophie et folie. Elle a choisi de s’installer dans la ville natale du philosphe pour fuir «l’asphyxie parisienne» où il était «hors de question» qu’elle élève ses deux enfants. À Poitiers, elle a trouvé une ville «proche de la nature, riche culturellement». Un territoire où elle a à coeur de «s’inscrire», pour développer ses activités, ene milieu rural notamment. Elle planche en ce moment sur Une affaire d’âme, d’Ingmar Bergman, monologue d’uen femme qui devient folle. S’appuyant sur le projet – inachevé – du cinéaste de réasliserun film constitué d’un unique plan serré sur le visage de cette femme, elle a déjà imaginé un éloquent dispositif de mise en scène avec plusieurs niveaus de réalité. En écho à ce théâtre de fiction, Céline Agniel souhaite développer un «théâtre du réel». «Êtes-vous fou ?» C’est la question qu’elle veut poser à différents publics – enfants, adultes, personnes âgées – pour créer ensuite un spectacle à partir de ces multiples perceptions de la folie. Un spectacle auquel les personnes interrogées qui le souhaitent pourraient prendre part. Un pari un peu fou peut-être ? Un théâtre, en tout cas, qui s’attache à créer du lien et que Céline Agniel conçoit comme «un engagement artistique, intellectuel et social».